Claire Trotignon / Paysages acrobatiques
La galerie 8+4 est heureuse de présenter du 10 octobre 2024 au 11 janvier 2025, « Paysages acrobatiques », la troisième exposition personnelle de Claire Trotignon.
Depuis quelques mois, la pratique de Claire Trotignon est entrée dans une phase de métamorphose. Si les fragments de gravures anciennes constituent toujours la base de ses collages, ses compositions ont désormais une ampleur et une échelle sans équivalent grâce à la collision d'éléments hétéroclites. Le point de vue perspectif traditionnel cède la place à de nouveaux espace-temps. Les fonds, autrefois blancs et neutres, s'enrichissent de couleurs vives, dont un bleu lumineux. Au sein de ces aplats, des fragments architecturaux en lévitation, inspirés par l'ordre classique des architectures antiques, flottent librement dans le vide, désamorçant ainsi l'idée de paysage romantique. Par leurs positions dans la composition, guidés en cela par une intuition géométrique, ces fragments et débris réaffirment une matérialité minérale et un équilibre en devenir. Le changement de focale en est réaffirmé. Il y a donc une énergie et une dynamique nouvelle au sein de ces œuvres qui évoquent l'idée de ruine tout autant que la possibilité d'une reconstruction. Imaginés comme des adresses envers la réalité complexe de notre temps, ces collages réaffirment une polarité entre deux types d'espace simultané, à la fois complémentaires et opposés. Toujours portées par un rythme musical, ces nouvelles œuvres se présentent comme des possibilités pour repenser la poétique de l'espace autrefois défendues par Gaston Bachelard. Cette exposition préfigure la rétrospective monographique de l'artiste qui sera organisée en 2026 par le Frac Picardie.
Née en 1985, Claire Trotignon vit et travaille à Paris et Tours. Son travail a été présenté en France et à l'étranger (Biennale d'architecture de Venise, FIAC, Fondation Louis Vuitton, Untitled Miami), il a fait l'objet de plusieurs expositions personnelles dans des lieux institutionnels français (Le SHED-CAC, FRAC IDF, Centre Pompidou Metz). Ses œuvres ont intégré des collections publiques (Collection d’art Société Générale, BNF, FMAC, New York Public Library) et de nombreuses collections privées.
Trotignon (Claire)
Claire Trotignon est née en 1985 à Paris où elle vit et travaille actuellement. Diplômée avec mention spéciale de l’École supérieure des beaux-arts de Tours en 2008, Claire Trotignon s’affirme comme l’une des plus talentueuses artistes de sa génération.
Il faut percevoir la pratique du collage chez Claire Trotignon comme une tentative réussie de parler de notre époque, d’en parler autrement. Il y a chez elle une heureuse collision entre des éléments appartenant au passé et des formes visiblement issues du futur. Rien dans ses œuvres ne semble parler de notre présent ni même renvoyer à quelque événement ou mutations de notre culture. Chacun de ses paysages, elle les compose à partir de centaines de fragments de gravures du XIXe siècle qu’elle découpe minutieusement avant de les coller, de les arranger et de les distribuer de façon éparse sur un fond blanc immaculé. Leurs rassemblements façonnent des affleurements rocheux prenant la forme de montagnes, de falaises, ou se réduisant à quelques éléments dénotant d’un lieu sans localisation précise. Et toujours, un arbre, voire un bosquet, vient fixer l’échelle. Autours l’infini, le vide, si présent dans ce blanc qui irradie tout en laissant les choses en suspens. Chez Claire Trotignon, le vide est la base même de la composition et réfute toute forme de pesanteur. Les choses flottent librement, excluant tout horizon clairement défini, voire même une ligne de fuite contraignante. Le cadre apparait dès lors comme une découpe arbitraire.
Comme de véritables pièges pour le regard, ces collages se peuplent d’architectures, ou plus exactement de fantômes de constructions. De séries en séries, elles se sont faites plus abstraites au point de s’incarner tout autant dans les structures archaïques de peuples anciens ou prendre l’évidence minimaliste d’architectures utopiques qu’elle se pare régulièrement de touches d’un bleue intense appliquées au pinceau. Ces arches, ces murs aveugles, ces fosses et esplanades, ces perspectives sans fin évoquent un monde futur en lévitation ou le réel semble avoir perdues toute substance, éparpillé dans les plis du temps et donc de notre imaginaire. Claire Trotignon réaffirme que tout paysage notamment urbain, est avant tout une construction mentale où se cristallise les enjeux de la représentation dans une culture donnée. En jouant avec l’idée d’histoire, de cycle, en convoquant des modes de figuration non occidentaux (on pense notamment aux estampes japonaises), ses collages produisent au final une image ou le passé et le futur semble s’annuler dans les ruines du présent. Car les paysages que composent Claire Trotignon sont évidemment métaphoriques et renvoient aussi à cet éclatement de nos cultures contemporaines.
Pas de commentaires client pour le moment.